#Enveloppes ? 1 : La vie intra-utérine : une première expérience de l'enveloppe.
- Alexandre Constant
- 17 août 2021
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 2 nov. 2021

Enveloppement, contenance... Ces termes entrent peu à peu dans le langage commun mais que recouvrent-ils ?
Les récepteurs cutanés apparaissent au cours du deuxième mois de grossesse, autour de la bouche, et des lèvres. À la onzième semaine, tout le visage est équipé de ces récepteurs, ainsi que les mains et la plante des pieds puis à la vingtième semaine, ils recouvrent l'ensemble du corps. Nous savons que le fœtus manifeste, et peut rechercher, le contact de telle ou telle partie de son corps avec la paroi utérine, qu’il montre sa réactivité au contact venant de l'extérieur, qu’il peut rechercher à sucer son pouce... Les semaines passant, l’espace se faisant fatalement de plus en plus réduit, le corps du fœtus entre peu à peu dans un contact permanent avec la paroi utérine, participant ainsi d’un premier sentiment d’enveloppement.
Par ailleurs, il peut être intéressant de rappeler que les cellules épidermiques et les cellules nerveuses sont intiment liées. L'ectoderme, l'un des trois feuillets primaires durant l'embryogenèse, va donner par différenciation et maturation, l'épiderme (épiderme de la peau, cristallin et cornée des yeux) et le neuroectoderme (système nerveux central et périphérique soit le myélencéphale, le métencéphale et le mésencéphale, la moelle épinière, les ganglions spinaux et sympathiques, etc...). Originairement liés, l'articulation entre ces deux systèmes s'impose à nous lorsqu’apparaissent « des plaques », démangeaisons, boutons, eczéma et autres rougeurs, ou encore toux et asthme, dont les aspects psychosomatiques de certaines formes sont de plus en plus connus (pour de plus amples détails sur les liens entre peau et trauma : https://revisherault.org/le-rapport-entre-la-sante-de-la-peau-et-le-trouble-de-stress-post-traumatique/)
Mais l'enveloppe psychocorporelle ne se résume pas à cette enveloppe épidermique. À celle-ci s'ajoute l'enveloppe olfactive, les récepteurs olfactifs apparaissant entre la huitième et la onzième semaine et étant considérés comme opérationnels à la trentième semaine. Le fœtus sent et goutte le liquide amniotique dans lequel circulent des odeurs en lien avec la mère. À la naissance, l'olfaction est l'un des sens privilégiés de reconnaissance de l'autre. Dès la naissance, l'enfant peut reconnaître sa mère olfactivement.
Enfin, à la quinzième semaine commence de se former le marteau, l'enclume et l'étrier, les os nécessaires à l'audition. Les premières sensations de la vie auditive seront essentiellement vibratoires. Les distinctions plus fines viendront entre le quatrième et le cinquième mois.
Enfin, il est à noter le rôle fondamentale des contractions utérines tout au long du développement. Si l'enveloppe utérine participe d'un sentiment de contenance par les stimulations permanentes de la peau du foetus, elle lui donne également à vivre un premier sentiment d'ancrage et d'axialité. Enveloppe tonique, elle vient masser et stimuler quotidiennement la colonne vertébrale du tout-petit comme pour venir lui donner à vivre une première expérience d'un appui-dos et d'un axe sur lequel s'étayer et se construire.
Les personnes ayant une affinité avec la psychologie du développement retrouvent ici ce que des auteurs comme Didier ANZIEU ont décrit : expérience des fonctions de consensualité (les stimulations sensorielles conjointes), de contenance (dans les stimulations de la peau par l'enveloppe utérine) et de soutenance (par la prise de conscience tonique d'un axe).
Ces enveloppes, conjointes, entremêlées vont avoir des fonctions fondamentales.
Elles vont participer d'un premier sentiment de continuité et de rythmicité. Le fœtus vit les rythmes de sa mère, et de l'environnement, par l'intermédiaire de toutes ces modalités sensorielles. Il perçoit la différence de rythmes de la veille au sommeil, l'alternance des goûts, des sons, des vibrations qu'elles soient liées à l'extérieur comme à l'intérieur. En effet, tout ceci se vit sur la toile de fond des organes internes de la mère. Il entend, perçoit et réagit donc à ce que vit sa mère dans sa globalité psychocorporelle.

Ce que nous pourrions appeler cette proto-enveloppe va être le terreau sur lequel vont reposer les constructions à venir. Bien que nous connaissions de mieux en mieux les conséquences du stress maternel, ou des trauma in utéro, cette proto-enveloppe n'est en aucun cas prédictive de quoi que ce soit. Elle va donner à vivre au fœtus le premier sentiment de continuité, d'inscription dans des « avant-pendant-après » dont il retrouvera des éléments à l'extérieur.
Ce sont, enfin, des enveloppes qui sont toujours actives en nous. La recherche de toucher ou, au contraire, le vécu intrusif face à celui-ci, le plaisir éprouvé dans les vibrations, la recherche de la vibration englobante chez certaines personnes face à la musique, la nécessité de se parer d'une enveloppe olfactive opaque ou, parfois en réponse, le sentiment d'intrusion que l'on peut ressentir face à l'enveloppe olfactive trop envahissante de l'autre, ne sont que des manifestations de ce sentiment d'enveloppe multisensorielle que nous avons expérimenté, éprouvé, testé, malmené, cultivé depuis la vie intra-utérine jusqu'à aujourd'hui.
La prochaine partie nous permettra d'explorer comment, justement, ces enveloppes se réajustent après la naissance et se donne à voir, à entendre et à sentir tout au long de notre vie.
À bientôt !
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